La violation des dispositions d’ordre public entraine forcément la nullité du contrat de construction de maison individuelle mais le constructeur peut-il être indemnisé des travaux qu’il a déjà effectués?
Civ 3ème, 26 juin 2013, n°12-18121
L’article L 231-2 du Code de la construction et de l’habitation liste plusieurs éléments indispensables pour la validité du contrat de construction de maison individuelle.
En effet, il dispose que:
Le contrat visé à l’article L. 231-1 doit comporter les énonciations suivantes :
a) La désignation du terrain destiné à l’implantation de la construction et la mention du titre de propriété du maître de l’ouvrage ou des droits réels lui permettant de construire ;
b) L’affirmation de la conformité du projet aux règles de construction prescrites en application du présent code, notamment de son livre Ier, et du code de l’urbanisme ;
c) La consistance et les caractéristiques techniques du bâtiment à construire comportant tous les travaux d’adaptation au sol, les raccordements aux réseaux divers et tous les travaux d’équipement intérieur ou extérieur indispensables à l’implantation et à l’utilisation de l’immeuble ;
d) Le coût du bâtiment à construire, égal à la somme du prix convenu et, s’il y a lieu, du coût des travaux dont le maître de l’ouvrage se réserve l’exécution en précisant :
– d’une part, le prix convenu qui est forfaitaire et définitif, sous réserve, s’il y a lieu, de sa révision dans les conditions et limites convenues conformément à l’article L. 231-11, et qui comporte la rémunération de tout ce qui est à la charge du constructeur, y compris le coût de la garantie de livraison ;
– d’autre part, le coût des travaux dont le maître de l’ouvrage se réserve l’exécution, ceux-ci étant décrits et chiffrés par le constructeur et faisant l’objet, de la part du maître de l’ouvrage, d’une clause manuscrite spécifique et paraphée par laquelle il en accepte le coût et la charge ;
e) Les modalités de règlement en fonction de l’état d’avancement des travaux ;
f) L’indication que le maître de l’ouvrage pourra se faire assister par un professionnel habilité en application de la loi n° 77-2 du 3 janvier 1977 sur l’architecture ou des articles L. 111-23 et suivants lors de la réception ou par tout autre professionnel de la construction titulaire d’un contrat d’assurance couvrant les responsabilités pour ce type de mission ;
g) L’indication de l’obtention du permis de construire et des autres autorisations administratives, dont une copie est annexée au contrat ;
h) L’indication des modalités de financement, la nature et le montant des prêts obtenus et acceptés par le maître de l’ouvrage ;
i) La date d’ouverture du chantier, le délai d’exécution des travaux et les pénalités prévues en cas de retard de livraison ;
j) La référence de l’assurance de dommages souscrite par le maître de l’ouvrage, en application de l’article L. 242-1 du code des assurances ;
k) Les justifications des garanties de remboursement et de livraison apportées par le constructeur, les attestations de ces garanties étant établies par le garant et annexées au contrat.
Les stipulations du contrat, notamment celles relatives aux travaux à la charge du constructeur, au prix convenu, au délai d’exécution des travaux et aux pénalités applicables en cas de retard d’exécution peuvent se référer à des clauses types approuvées par décret en Conseil d’Etat.
Il a été depuis longtemps jugé que ces dispositions étaient d’ordre public et que l’absence d’un des documents pouvait entrainer la nullité du contrat de construction de maison individuelle.
Le contrat risque donc d’être déclaré nul!
Mais se posait la question de la conséquence de cette annulation.
Selon certaines juridictions, il fallait, même si le contrat était annulé, que le maître de l’ouvrage (celui qui fait réaliser les travaux) indemnise le constructeur pour les travaux déjà réalisés au moment de l’annulation du contrat.
C’est ce qu’avait décidé la Cour d’appel en l’espèce.
En cours de chantier, une fissuration était apparue sur une des façades.
Le constructeur avait proposé de réaliser des travaux pour y remédier mais le maître de l’ouvrage avait considéré que ces travaux n’étaient pas suffisants.
Il a donc sollicité l’annulation du contrat de construction en se fondant sur l’article 231-2,k du code de la construction et de l’habitation (la garantie d’achèvement n’avait pas été annexée au contrat contrairement aux dispositions de l’article précité).
La Cour d’appel annule le contrat mais décide que le maître de l’ouvrage devra payer au constructeur le coût total estimé de la construction réalisée sous déduction du coût estimé des réparations à effectuer (elle avait ordonné une expertise pour chiffrer ces coûts).
La Cour de cassation censure l’arrêt :
« La nullité du contrat de construction de maison individuelle pour violation des règles d’ordre public protectrices du maître de l’ouvrage lui ouvre le droit de solliciter la remise en état du terrain sans indemnité pour le constructeur au titre des travaux réalisés ».
Elle ajoute que :
« La démolition, ordonnée à la demande du maître de l’ouvrage, interdit au constructeur de solliciter le coût des travaux qu’il a réalisés. »
Ce qu’il faut retenir :
- Un contrat de construction de maison individuelle doit être rigoureusement rédigé et doit contenir plusieurs documents indispensables (annexés) sous peine d’être annulé,
- L’annulation éventuelle du contrat pour violation des règles d’ordre public protectrices du maître de l’ouvrage interdit au constructeur de demander une indemnisation pour les travaux qu’il a déjà réalisés (le constructeur devra donc rendre le prix de la construction payé par le maître de l’ouvrage sans pouvoir être indemnisé des travaux qu’il a déjà effectués).
Si vous devez conclure un contrat de construction de maison individuelle ou si vous rencontrez un litige avec votre maître de l’ouvrage/votre constructeur n’hésitez pas à contacter votre avocat afin d’être conseillé et/ou représenté.